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« Protéger » 30% des terres d’ici 2030 : un désastre pour les peuples et une mauvaise idée pour la planète

1 December 2022

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Survival International, Amnesty International, Minority Rights Group International (MRG) et Rainforest Foundation UK (RFUK) appellent les Etats à urgemment reconsidérer leur engagement à déclarer 30% de la planète comme Aires protégées, qui devrait être adopté lors de la 15ème Conférence des Parties (CdP) sur la Convention des Nations unies sur la diversité biologique (CDB) qui se tient à Montréal en décembre. Sans une refonte en profondeur, l’objectif dit des « 30×30 » va dévaster les vies des peuples autochtones et avoir un effet hautement destructeur sur les moyens de subsistance d’autres communautés dépendantes des terres, tout en détournant l’attention des causes réelles de l’effondrement de la biodiversité et de la crise climatique.

En avril 2021, 250 organisations autochtones, ONG et chercheurs ont exprimé leurs inquiétudes concernant la proposition de doubler la surface érigée en Aires protégées, inclue dans le Cadre mondial de la biodiversité pour l’après-2020 (GBF).[1] Les Aires protégées, qui constituent la base du modèle de conservation actuel tel que dicté par les pays occidentaux, sont à l’origine de nombreuses expulsions entrainant famine, maladies et de multiples violations des droits humains, telles que des meurtres, des viols et des actes de torture en Afrique et en Asie notamment.

Un grand nombre d’acteurs ont par la suite manifesté leurs préoccupations sur le coût humain de l’objectif des « 30×30 » et sur le fait qu’étendre le réseau d’Aires protégées pourrait entraîner davantage de violations des droits humains[2] et d’autres impacts négatifs sur des millions de personnes qui sont pourtant les moins responsables de la disparition accélérée de la biodiversité et de la crise climatique.

Beaucoup de promesses ont été faites en matière d’intégration des droits humains dans le GBF, et le rôle des « autres mesures de conservation efficaces par zone » (AMCE) dans l’objectif des 30×30 est souvent mis en avant. Cependant, si les AMCE incluent potentiellement des territoires gérés par les peuples autochtones[3], en l’absence de protection bien plus solides pour les communautés, il est fort probable que les Aires protégées basées sur leur exclusion continuent de constituer l’essentiel de cet objectif. Les récentes révisions du GBF semblent au contraire faire marche arrière sur ces protections, en reléguant les dispositions sur les droits, initialement parties intégrantes de l’objectif, à de simples ‘orientations’ dans une partie distincte.[4]

« 30×30 » est également un nombre arbitraire sans réel fondement scientifique.[5] Il existe peu de preuves que les Aires protégées existantes ont effectivement protégé les écosystèmes et qu’elles devraient donc être étendues, et cet objectif est fixé sans évaluation de leurs impacts sociaux et humains. Les données scientifiques indiquent qu’étendre le réseau d’Aires protégées ne suffira manifestement pas à stopper l’effondrement écologique, et que l’accent doit être mis sur la lutte contre les causes de la dégradation de la biodiversité, notamment la surconsommation. Nous remarquons que d’autres points clés du GBF, notamment la cible 15 visant à s’attaquer à ces aspects, ont été progressivement dilués au gré des révisions successives.

Étant donné que 80% de la biodiversité se trouve sur les terres de peuples autochtones, il est clair que le meilleur moyen de conserver les écosystèmes est de protéger les droits de ceux qui y vivent et en dépendent.

Ainsi, nous pensons qu’une approche fondamentalement différente pour atteindre les objectifs de conservation est nécessaire, et devra notamment :

  1. En priorité reconnaitre et protéger les régimes fonciers coutumiers collectifs des peuples autochtones, en garantissant leurs droits à la terre, aux ressources, à l’auto-détermination et au consentement libre, informé et préalable, tels que reconnus dans les accords internationaux en matière de droits humains.
  2. Reconnaître aux autres communautés utilisant les terres à des fins de subsistance leur droit à ne pas être expulsées de force, à jouir d’un niveau de vie suffisant, et à être consultées sur toutes les décisions qui affectent leurs droits.
  3. Veiller à ce que les espèces menacées et les écosystèmes soit suffisamment protégés, plutôt que de simplement augmenter les Aires protégées.
  4. S’attaquer de manière adéquate aux causes sous-jacentes de la perte de la biodiversité.

[1] Voir ce document.

[2] Voir notamment Policy Brief No. 1, Human rights-based approaches to conserving biodiversity: equitable, effective and imperative, UN Special Rapporteur on Human Rights and the Environment, David R. Boyd and Stephanie Keene, August 2021.

[3] Ceci n’est pas la même chose que de simplement inclure les territoires autochtones dans l’objectif des 30%. Les AMCE exigent des peuples autochtones qu’ils remplissent un certain nombre de conditions, notamment la preuve d’un lien de causalité directe entre les objectifs de gestion de leur territoire et une conservation de la biodiversité sur le long terme.

[4] Par exemple dans ce texte émanant du Groupe Informel d’octobre 2022.

[5]  “L’engagement de conservation 30×30 n’est pas soutenu par la science”, avertissent les groupes de défense des droits de l’homme, Rainforest Foundation UK, juin 2022.

Photo : Fumée de cuisine vue s’élevant d’une maison traditionnelle Batwa dans le parc national de Kahuzi-Biega en République démocratique du Congo, avant les attaques. Crédit : Robert Flummerfelt.

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