Bahá’í en Tunisie

  • Profil

    Bien que ses membres se comptent probablement par centaines, on ne connaît pas l’étendue exacte de la communauté bahá’íe de Tunisie. Leur foi n’étant pas reconnue par l’État, il n’existe pas de chiffres officiels et les membres de la communauté eux-mêmes sont réticents à donner des estimations, étant donné que beaucoup de ses pratiquant.e.s ne sont pas connu.e.s.

    Ce manque de reconnaissance prive également les bahá’í.e.s de lieu de rassemblement et les expose à un degré de discrimination plus élevé que les communautés juive et chrétienne de Tunisie. Pour toutes ces raisons, il est difficile pour les bahá’í.e.s d’entrer en contact les un.e.s avec les autres. quoique Facebook semble être la plateforme privilégiée. 

    Contexte historique

    On pense que la foi bahá’íe a été introduite en Tunisie en 1921 par Mohieddine Kurdi. Les bahá’í.e.s n’ont pas de clergé, mais s’organisent en assemblées spirituelles locales et nationales composées de neuf fidèles (hommes et femmes), un nombre sacré dans la foi bahá’íe.

    La communauté a néanmoins signalé faire l’objet d’un harcèlement et d’une discrimination continus. En 2008, le mufti tunisien a émis une fatwa contre la foi bahá’íe, laquelle a durablement affecté la communauté. Leur foi n’étant pas reconnue, les bahá’í.e.s ne peuvent pas s’enregistrer en tant que communauté religieuse et ont donc entrepris des démarches pour le faire en tant qu’organisation de la société civile.

    Trois épisodes méritent particulièrement d’être soulignés. En 2012, l’Association bahá’íe de Tunisie a voulu s’enregistrer en tant qu’association civile prônant la non-discrimination, l’égalité et l’unité. Sa demande a été refusée par le Premier ministre en raison de la présence du mot « bahá’íe » dans son nom (la justification avancée était que les organisations civiles n’étaient pas censées être de nature religieuse, alors qu’il existe plusieurs organisations musulmanes civiles). L’association a fait appel de cette décision devant le tribunal administratif, puis engagé des procédures pour la même affaire devant le tribunal de première instance. Son recours a été rejeté au motif que la décision appartenait au Premier ministre. Fin 2017, la communauté a adressé une lettre au président de la République, au président du Parlement et au Premier ministre, dans laquelle elle dénonçait la discrimination dont elle était victime et demandait la reconnaissance officielle de sa foi, notamment de l’Assemblée spirituelle nationale. Cette démarche faisait suite à un incident survenu en septembre 2017, lorsque la police était venue chercher un bahá’í de 20 ans chez lui, près de Monastir, et l’avait interrogé pendant plusieurs heures sur sa religion.

    Enfin, en 2020, la communauté a reçu un jugement positif concernant le premier verdict du tribunal administratif, qui l’autorisait à s’enregistrer en tant qu’organisation de la société civile UDD (Unité dans la Diversité), sans mention du bahaïsme dans son nom. 

    Enjeux actuels

    La communauté bahá’íe de Tunisie prend une part active à la société civile et œuvre à l’égalité des citoyen.ne.s en organisant des événements axés sur la cohabitation. Sa principale revendication tient au droit de s’organiser et d’opérer légalement. La non-reconnaissance implique l’impossibilité d’avoir un compte bancaire, d’organiser une collecte de fonds pour la communauté ou de créer des infrastructures pour éduquer leurs enfants selon la foi bahá’íe. La communauté a également adressé une pétition au ministre des Affaires locales concernant l’établissement d’un cimetière bahá’í, jusqu’ici restée sans réponse.

    Le contrat de mariage bahá’í, reconnu dans plusieurs pays, ne l’est pas en Tunisie ; néanmoins, les bahá’í.e.s peuvent enregistrer des mariages civils comme le reste de la population tunisienne. Parce qu’ils souhaitent rester dans l’ombre, beaucoup de membres de la communauté contactent la municipalité juste avant leur mariage pour l’informer de leur foi. Certaines refusent alors de célébrer la cérémonie, ce qui les oblige à chercher ailleurs jusqu’à en trouver une qui accepte. Les bahá’í.e.s ont entre-temps identifié les municipalités qui sont plus ouvertes à leur communauté. En ce qui concerne l’héritage, les bahá’í.e.s appliquent la loi tunisienne comme les autres citoyen.ne.s, mais  peuvent passer des contrats privés s’ils ou elles souhaitent attribuer des parts égales à leurs enfants de sexe masculin et féminin, comme, d’ailleurs, de nombreux.ses musulman.e.s de Tunisie.

    En mars 2021, les bahá’í.e.s ont porté plainte auprès du procureur de la République devant le tribunal de première instance de Tunis contre le Premier ministre, le ministre des Affaires religieuses, le mufti de la République et le secrétaire général du gouvernement après la parution de rapports et de correspondance officiels refusant de publier la déclaration de création de l’organisation. Le tribunal administratif a rendu un jugement préliminaire favorable à l’Association bahá’íe de Tunisie, contre lequel le président du gouvernement a fait appel en premier jugement. Selon la plainte déposée par les membres de l’Association bahá’íe, les documents du gouvernement, classés dans le dossier administratif d’appel, contenaient des déclarations qui risquaient de mettre gravement en danger la vie des membres de l’association. Ces documents contenaient en effet des arguments tirés de la fatwa de 2008 mentionnée ci-dessus, émise par le mufti de la République et par le ministre des Affaires Religieuses, ainsi qu’un avis consultatif de l’Académie internationale du fiqh islamique, qui contenait des accusations de blasphème/non-croyance (tafkir) contre les membres de l’association en raison de leur foi bahá’íe.

    Mis à jour en novembre 2021

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